Jacques
Burko (1933 - 2008)
L’homme
qui a « porté » Diasporiques, Cahiers du cercle
Gaston-Crémieux pendant plus de huit années n’est plus.
Lorsque
naquit, en 1996, le projet de créer une revue susceptible
de diffuser la pensée du Cercle Gaston-Crémieux au-delà
du noyau de ses adhérents, nous fûmes en vérité peu nombreux
à croire l’idée viable à long terme. Jacques Burko fut l’un
de ceux-là, et l’un des plus enthousiastes puisque c’est
lui qui accepta de prendre en charge la lourde responsabilité
de passer à l’acte, de rassembler, trimestre après trimestre,
des articles pertinents et d’une qualité digne de nos ambitions.
Une responsabilité qui, lorsque la revue eut ainsi acquis,
sous son impulsion, plusieurs centaines d’abonnés, fut consacrée
par la reconnaissance formelle de la fonction de rédacteur
en chef qu’en fait il exerçait depuis l’origine.
Écrivant
un français si remarquable qu’on ne pouvait imaginer qu’il
ne s’agissait pas de sa langue maternelle, parlant aussi aisément
le polonais ou le russe que l’anglais, Jacques Burko était
un passionné de littérature et de poésie. Les lecteurs de Diasporiques ont
ainsi eu de multiples occasions d’apprécier, entre autres,
ses qualités éminentes de traducteur de poèmes souvent bouleversants.
Mais c’était aussi un militant juif s’inscrivant dans la tradition
bundiste
: diasporiste
comme il se plaisait
à le dire pour bien marquer son engagement idéologique en
dehors de la religion et du sionisme. Respectueux de la diversité
d’opinion, il utilisait le pseudonyme de Nakhalnik lorsqu’il
souhaitait s’exprimer à titre personnel – il le faisait souvent
avec vivacité – mais sans
pour autant engager la revue derrière lui. Nous
ne fûmes tous deux pas toujours d’accord sur tout et notamment
sur l’évolution envisageable de Diasporiques.
Mais
l’évocation de ces quelques divergences ne fait que renforcer
– comme il me le rappelait lui-même dans une lettre qu’il
m’avait envoyée il y a tout juste un an – ce que fut « notre
amitié, fondée non seulement sur un long parcours commun
mais aussi sur une fréquente communauté de vues, sur la
préférence donnée à l’important en négligeant l’accessoire,
sur une connivence qui nous a souvent réunis ». Nous
avons tous beaucoup perdu en perdant bien trop précocement
Jacques. J’ai moi-même perdu quelqu’un dont l’amitié exigeante
savait aussi être critique, ce qui rend cette perte plus
lourde encore.
Extrait de Certidoutes, ce poème a été
choisi par Berthe Burko

2. Jacques Burko, publication posthume. Certitudes : poèmes, Paris,
Buchet-Chastel, 2009.